Cinéma

PHILIPPE DANA RESSUSCITE L’ESPRIT « ÇA CARTOON » AU FESTIVAL LUMIÈRE

today23 octobre 2025 7

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Ce dimanche 19 octobre au matin, le Festival Lumière proposait une séance pas comme les autres : un retour à l’âge d’or du cartoon, présenté par celui qui en fut l’ambassadeur pendant 22 ans sur Canal+, Philippe Dana. L’ancien animateur, venu dédicacer son dernier livre « Au pays des toons », a offert au public une plongée nostalgique et cinéphile dans les coulisses de Bip Bip, Betty Boop et Tom & Jerry, avec des projections exceptionnelles en 35mm.

 

La « bourde » qui lança 22 ans de culte

Le moment le plus savoureux de la rencontre fut sans doute le récit par Philippe Dana de la naissance de « Ça Cartoon ». Une histoire de hasard et d’erreur providentielle.

En 1986, le jeune Philippe Dana, alors à la rédaction de Canal+, est pressenti pour animer « Star Quiz », l’adaptation du jeu américain Jeopardy. Le patron, Pierre Lescure, le convoque et lui annonce : « C’est toi qui vas présenter ». Mais la joie est de courte durée. « Quelques minutes plus tard, le téléphone a resonné… Pierre Lescure veut te revoir », raconte Dana. « Il m’a dit : ‘Excuse-moi, je me suis trompé. C’est pas toi qui es choisi, c’est Philippe Risoli' ».

La déception fut grande, mais la compensation allait changer sa carrière. « Pour toi, il y a quelque chose d’autre », lui dit Lescure. La chaîne avait acheté un stock de dessins animés de la Warner et avait constaté, en les diffusant à l’été 1985, « un pic d’audience à chaque fois ». L’idée était simple : regrouper cinq ou six de ces courts-métrages et « mettre un type au milieu qui fera les lancements ». Ce « type », ce fut Philippe Dana. L’aventure « Ça Cartoon » était lancée et allait durer 22 ans, un fait assez rare à la télévision.

Derrière le gag, des génies et des adultes

La séance, ponctuée de classiques, fut l’occasion pour Philippe Dana de rappeler que ces œuvres étaient tout sauf enfantines. « Ce sont des films qui ont été faits non pas pour les enfants, mais par des adultes qui pensaient s’adresser à d’autres adultes », a-t-il insisté.

Chuck Jones et le Coyote de Mark Twain En introduisant le premier Bip Bip et Coyote (Fast and Furry-ous, 1949), Dana a rendu hommage au réalisateur Chuck Jones. Il a révélé que Jones s’était inspiré non seulement de Chaplin, mais aussi d’un roman de Mark Twain, « À la dure » (Roughing It), qui décrit le coyote comme un animal « décharné » qui « au fond est la risée des autres ».

Betty Boop, l’icône « pré-Code » La projection de Minnie the Moocher (1932) a mis en lumière les studios Fleischer de New York. Dana a souligné le caractère unique de Betty Boop, « le seul personnage femme héros de dessin animé ». Il a décrit l’ambiance « sulfureuse » de ces films « pré-Code Hays », où la musique jazz (ici Cab Calloway) était omniprésente. Une liberté qui disparaîtra avec la censure : « Betty Boop s’est beaucoup assagie, on a rallongé sa robe, et les histoires étaient assez plates ».

Le son de Mel Blanc et le rythme de Tex Avery

Philippe Dana a également salué le « génie » Mel Blanc, l’homme qui, à la radio puis chez Warner, prêtait sa voix à « tous les personnages », de Porky Pig à Bugs Bunny en passant par Daffy Duck.

Impossible d’évoquer les cartoons, sans parler du maître Tex Avery (période MGM), un as du rythme qui avait « absolument compris l’histoire des 24 images par seconde », et le duo William Hanna et Joseph Barbera, plus connus sous le duo Hanna-Barbera (Tom & Jerry), dont les productions fastueuses à la MGM (« 50 000 dollars de budget ») contrastaient fortement avec leurs productions télévisées ultérieures, comme Les Pierrafeu ou Scooby-Doo, lorsque l’arrivée de la télévision a mis fin à cet âge d’or du cartoon au cinéma.

« Au pays des toons » de Philippe Dana (Calmann-Lévy, 2024)

Écrit par: Loic Couatarmanach

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